Le baptême biblique

Le baptême dans l'Esprit est-il distinct du baptême d'eau ? Si tel est le cas le premier serait celui qui sauve, le second une simple cérémonie. Le passage sur la conversion de Corneille peut troubler ceux qui pensent qu'on reçoit l'Esprit Saint au moment du baptême et donc que ces deux baptêmes n'en sont qu'un seul.

Ceux qui utilisent la conversion de Corneille comme fondement de leur théologie sur le baptême, doivent cependant prendre en compte deux choses :
- D'abord, dans l'ensemble de la Bible, le baptême du Saint-Esprit est l'exception et non la règle. Il n'a en réalité existé que deux fois seulement dans toute l'historiographie du christianisme. On n'en parle dans nul autre passage biblique, ni dans les écrits des pères apostoliques par la suite. Cela ne revient qu'au... 19ème siècle avec le pentecôtisme dans certaines églises méthodistes.
- Ensuite, dans la Bible il faut discerner entre LE don de l'Esprit et LES dons de l'Esprit. En Actes 10,44 et 11,15 littéralement il est dit que « le souffle sacré fond sur... »1. Expression typique de l'Ancien Testament ou (à part pour les prophètes) il s'agit DES dons de l'Esprit, c'est à dire ce que l'Esprit donne et non le don de lui-même.

La Bible est claire : le baptême fait partie du plan du salut : Marc 16,16 / Jean 3 / Romains 6 / Galates 3,27 / Éphésiens 4,4-6 / Tite 3,5 / 1Pierre 3,2-21. Si l'on veut raisonner uniquement bibliquement, sans baptême pas de salut.

Historiquement, dans le protestantisme, la question des sacrements a toujours été une pierre d'achoppement2.
- Pour les luthériens le baptême (mais aussi le Repas du Seigneur appelé Cène) est un véhicule de la grâce de Dieu. Selon cette interprétation, sans sacrement, pas de grâce, car Dieu agit dans le sacrement pour atteindre l'homme : la conversion est rendue possible par le sacrement.
- Au contraire, pour les partisans de Zwingli le réformateur Suisse, le baptême n'est que « le signe d'une grâce déjà faite ». C'est l'homme déjà atteint par Dieu qui bénéficie du sacrement. Le baptême d'eau est donc postérieur à la conversion.
- Calvin tenta ensuite une synthèse : pour lui Dieu agit au moment du baptême. Il n'y pas de chronologie possible entre don de Dieu et cérémonie. Il n'y a pas de causalité non plus, c'est à dire que l'un ne cause pas l'autre ni réciproquement : tout est simultané.
La synthèse de Calvin évite les deux écueils des deux premières propositions : celle de Luther qui ouvre la porte à la superstition en donnant trop d'importance au rite baptismal, et celle de Zwingli qui rend le baptême optionnel. Elle a en outre l'avantage d'être plus conciliable avec la Bible.

Quelques précisions cependant sur le baptême :

- le baptême n'est pas un acte (une œuvre) : on ne se baptise pas soi-même, on le reçoit au nom de Jésus. En grec, dans le Nouveau Testament, la forme est toujours au passif pour les gens qui sont baptisés et à l'actif pour ceux qui baptisent.

- Romains 6,3-5 parle d'une assimilation à la mort, l'ensevelissement et la résurrection du Christ par le baptême. Ce n'est pas juste une expression extérieure (et postérieure) de notre foi intérieure. Le baptême est un symbole, ce qui veut dire qu'il participe à la réalité du salut. Le baptême n'est pas un signe qui indiquerait simplement le salut.

- dans les Actes, les conversions sont immédiatement suivies du baptême (même pour Corneille). Celui qui tarde le plus c'est Saul, il a mit... 3 jours ! Personne n'attend le jour de la Pâque de l'année prochaine. Il y a dans le baptême un caractère urgent : Actes 22,16.

- Éphésiens 4,4-6 dit qu'il n'y a qu'un seul baptême, car baptême de repentance, baptême du Saint-Esprit, et baptême pour le pardon des péchés, sont réunis en un seul baptême : le baptême au nom de Jésus (Actes 19,1-6) au cours duquel on accepte le pardon de tous nos péchés, et on reçoit LE don de l'Esprit Saint.

- En Actes 8,22 Pierre dit à Simon le magicien de se repentir et de prier pour être pardonné. Si ce passage est souvent invoqué avec 1Jean 1,9 pour justifier « la prière du pécheur », il faut juste remarquer que Simon a déjà été baptisé (v8,13). En réalité, quelqu'un qui croit, qui se repent mais qui refuse le baptême pour le pardon des péchés et le don du Saint-Esprit, en réalité, ne croit pas vraiment, et ne se repent pas vraiment.

- La même logique s'applique en Actes 16,31 qui ne peut pas être séparé des 3 versets qui suivent : croire (v31 et 34) c'est entendre la parole (v32) être baptisé (v33), la repentance étant démontrée par le lavage des plaies de Paul et Silas (œuvre digne de la repentance ; Luc 3,8 et Actes 26,20).

- Attention, il existe une différence entre « baptiser des gens » et « faire des disciples et les baptiser au nom de Jésus pour le pardon des péchés et le don du Saint-Esprit » (Matthieu 28,18-20).


Notes

(1) Traduction Chouraqui

(2) Pour une synthèse très claire sur le sujet, voir : André Gounelle, « Protestantisme et Sacrements », Laval Théologique et Philosophique, Vol 46, N°2, 1990, p.197-207

Pour aller plus loin, ce livre d'Everett Ferguson, véritable encyclopédie sur le sujet du baptême, donne tous les détails possibles et imaginables de la manière la plus objective qui soit. Il n'est malheureusement pas traduit en français.

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