Quelle fut l'action de l'Esprit dans la première communauté de chrétiens après la pentecôte ? Même si dans le « sommaire »1 d'Actes 2,42-47 il n'est pas dit spécifiquement et explicitement que l'Esprit faisait ceci ou cela on peut considérer l'état d'esprit de cette communauté : une communauté qui obéit et à laquelle Dieu a donné son Esprit Saint (Actes 5,32).
Le verset 42 est un condensé, développé dans les versets 43 à 47, qui décrit la vie spirituelle concrète et quotidienne de la nouvelle communauté des convertis. Dans ce sommaire, qui marque la fin d'une partie de son livre et le début de la suivante, Luc donne une théologie de l’Église idéale qui commence avec la notion d'assiduité ou de persévérance dans certains domaines spirituels :
a) La communion ou la communauté :
En Marc 3,20-35 la séquence sur Béelzebul et sur le blasphème contre le Saint-Esprit est encadrée par des réactions de la parenté de Jésus. Jésus redéfinit sa famille : elle est désormais constituée de ceux qui reconnaissent l'Esprit Saint à l'œuvre en Lui. Après la pentecôte, former une communauté spirituelle conduit ces croyants à former une communauté physique pour laquelle chacun met ses biens matériels à disposition des besoins communs. Paul en 1Corintiens 12,4-14 demande que les biens spirituels soient aussi mis en commun. Un chrétien de cette époque qui viendrait nous rendre visite aujourd'hui, serait choqué d'entendre des choses du genre « je suis croyant non pratiquant » ou « je suis croyant mais je n'appartiens à aucune communauté spirituelle ».
b) La fraction du pain :
Luc nous montre les disciples qui se rendent quotidiennement au temple (Actes 2,46, 3.1). Nous avons donc là, la description d'une communauté juive qui continue de vivre le judaïsme mais qui se retrouve pour rompre le pain dans les maisons lors de (vrais) repas en commun. Il s'agissait à ce moment-là d'un moment « privé » auquel n’assistaient pas les Juifs qui ne croyaient pas que Jésus est le Messie.
Plus tard, en 1Corinthiens 10,16-17 et 11,17-29, Paul explique (à une église dont les membres sont majoritairement d'origine païenne) avec quelle attitude, (c'est à dire avec quel esprit) il faut prendre le repas du Seigneur2.
c) La prière :
Luc nous dit comment priaient les disciples : ils louaient Dieu. Mais il demandaient aussi à Dieu son assistance. Et que leur donnait-il en réponse à leur prière ? D'être remplis de l'Esprit car c'est ce qui est le plus important pour vivre spirituellement dans ce monde (Luc 11,13).
d) L'enseignement des apôtres :
C'était un enseignement concernant Jésus et basé sur les Ecritures (c'est à dire sur l'Ancien Testament). Jésus avait montré qu'il était le Christ, il avait prêché ce qu'est vraiment le royaume de Dieu, il avait expliqué ce qu'est un disciple, il a montré un exemple parfait, et est mort, ressuscité et monté au ciel d'où il a répandu l'Esprit Saint (Actes 2,33). Les 40 jours entre résurrection et ascension ont été pour les apôtres l'occasion de comprendre les Écritures (Luc 24,45). Mais l'Esprit va permettre aux disciples de comprendre les choses qu'ils ne pouvaient comprendre avant la glorification du Christ (Jean 16,12-15). Ainsi l'Esprit n'apporte pas de révélation nouvelle, mais il permet (Romains 7,6) de progresser dans la compréhension du Christ, à partir des Écritures, de l'enseignement et de la vie de Jésus. C'est pourquoi rejeter Jésus pendant son ministère terrestre était envisageable car il n'était pas encore glorifié. Rejeter l'Esprit Saint qui parle à travers les témoins de sa glorification devient un blasphème (Matthieu 12,31-32) car maintenant tout est réuni pour qu'on comprenne d'où vient le salut (Hébreux 2,1-4).
Conclusion : à travers sa vie spirituelle communautaire idéale qu'il nous décrit, Luc montre ce que veut dire concrètement obéir à Dieu parce qu'on croit à la promesse de Jésus comme Jean nous la rapporte :
Si vous m’aimez, vous garderez mes commandements, et moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Consolateur qui soit éternellement avec vous, l'Esprit de vérité... (Jean 14,15-16)
Questions pour méditer
- Est-ce que je fais partie d'une communauté chrétienne ?
- Suis-je prêt dans mon coeur à considérer que cette communauté est ma famille spirituelle ?
- Est-ce que je respecte le repas du Seigneur ? Comment est-ce que je le comprends ?
- Ma prière est-elle régulière ? Contient-elle assez de louange, où n'est elle qu'une somme de demandes à Dieu ?
- Suis-je assidu à suivre l'enseignement ? Est-ce que je recherche cet enseignement ?
- L'enseignement que je reçois est il nourrissant ? Est-il défiant ? Me pousse-t-il à progresser pour être plus à l'image de Jésus ? Si ce n'est pas le cas, que puis-je faire pour que cela change ?
Notes
1 En écrivant les Actes, Luc a structuré son récit en plusieurs parties que l'on peut retrouver avec des « sommaires », sortes de formules de transition entre ces parties qui résument spirituellement ce que Luc a raconté historiquement. La première partie des actes qui se déroule à Jérusalem contient elle-même plusieurs sous-parties dont les « sommaires » sont : Actes 2,42-47, Actes 4,32-34, Actes 5,11-16. Actes 6.7 fait la transition avec la deuxième partie qui concerne la Judée et la Samarie. Actes 9.31 fait la transition avec la troisième partie qui parle des Gentils et la conversion de Saul. Actes 12.24 fait la transition avec la quatrième partie racontant l'expansion du message en Asie. Actes 16.5 fait la transition avec la cinquième partie qui montre le message arrivant en Europe. Aces 19.20 fait la transition avec la sixième partie dans laquelle l'évangile atteint Rome. Actes 28.31 termine un peu brusquement le livre des Actes ouvrant sur une partie qui ne nous est pas racontée, mais que l'on peut rêver de vivre nous mêmes !
2 Curieusement, jamais le nouveau testament n'associe le pain et l'Esprit. Le pain n'est pas la présence de Dieu mais c'est un symbole important (Luc 24,35 ; Jean 6,32-35). C'est l'Esprit qui est la présence de Dieu.