Ici je fais une liste (plus qu'une étude) des écritures qui parlent de la crainte de Dieu et quand elle concerne ceux qui ne sont pas dans l'entourage des disciples.
Matthieu 9,1-8 // Luc 5,26 — Jésus guérit un paralytique à qui il a pardonné les péchés :
8En voyant cela, les foules, saisies de crainte, glorifièrent Dieu qui a donné aux humains une telle autorité.
Les foules sont saisies de crainte et elles glorifient Dieu. Est-ce suffisant pour nous inciter à prêcher la crainte de Dieu ? Le problème ici comme souvent dans les évangiles, c'est que les foules glorifient Dieu face au spectaculaire. Or ici ce qui devrait impressionner n'est pas la guérison de la paralysie, mais la grâce de Dieu. Les foules n'ont rien compris. En craignant et glorifiant Dieu elles passent à côté de l'important.
Matthieu 27,54 — après la mort de Jésus
54Voyant le tremblement de terre et ce qui venait d’arriver, le centurion et ceux qui étaient avec lui pour garder Jésus furent saisis d’une grande crainte et dirent : Celui-ci était vraiment Fils de Dieu.
Il n'y a pas d'article devant Fils de Dieu dans la phrase du centurion, ce qui semble indiquer que les soldats ont perçu qu'il y avait dans cet homme plus grand que l'empereur de Rome lui-même qu'on appelait du même titre. Leur crainte vient-elle du fait que maintenant, faisant face à la vérité, ils soient obligés de choisir ?
Matthieu 28,1–5 —Les femmes au tombeau
1Après le sabbat, alors que le premier jour de la semaine allait commencer, Marie-Madeleine et l’autre Marie vinrent voir le sépulcre. 2Soudain, il y eut un grand tremblement de terre ; car l’ange du Seigneur, descendu du ciel, vint rouler la pierre et s’asseoir dessus. 3Son aspect était comme l’éclair et son vêtement blanc comme la neige. 4Les gardes tremblèrent de peur et devinrent comme morts. 5Mais l’ange dit aux femmes : Vous, n’ayez pas peur, car je sais que vous cherchez Jésus, le crucifié.
A celles (et ceux) qui cherchent Jésus, il est commandé de ne pas avoir peur.
Luc 2,8–10 — Ceux qui sont prêts à entendre l’Évangile
8Il y avait, dans cette même région, des bergers qui passaient dans les champs les veilles de la nuit pour garder leurs troupeaux. 9L’ange du Seigneur survint devant eux, et la gloire du Seigneur se mit à briller tout autour d’eux. Ils furent saisis d’une grande crainte. 10Mais l’ange leur dit : N’ayez pas peur, car je vous annonce la bonne nouvelle
Ici la bonne nouvelle est annoncée aux bergers, une classe sociale méprisée par les juifs pieux des villes car leur mode de vie ne leur permettait pas d'observer scrupuleusement la Loi de Moïse. Mais pour l'ange du Seigneur (et donc pour Dieu lui-même) peut importe : à celles et ceux qui sont prêts à écouter la bonne nouvelle, il est commandé de commencer par ne pas avoir peur. Ne pas avoir peur est le début de la foi. Et cela concerne n'importe qui (ce qu'étaient les bergers pour les pharisiens ou les sadducéens).
Luc 7,14-17 — à Naïn, Jésus réveille un jeune homme mort
14Il s’approcha et toucha le cercueil. Ceux qui le portaient s’arrêtèrent. Il dit : Jeune homme, je te l’ordonne, réveille-toi ! 15Et le mort s’assit et se mit à parler. Il le rendit à sa mère. 16Tous furent saisis de crainte ; ils glorifiaient Dieu et disaient : Un grand prophète s’est levé parmi nous, et : Dieu est intervenu en faveur de son peuple. 17Cette parole se répandit à son sujet dans la Judée tout entière et dans tous les environs.
Encore une fois c'est la foule qui est saisie de crainte. D'où vient-elle cette crainte ? Du spectaculaire ? Ou de la question existentielle qu'un tel évènement peut susciter ?
Luc 8,35-37 — Jésus guérit un démoniaque
35Les gens sortirent pour voir ce qui s’était passé. Ils arrivèrent auprès de Jésus et ils trouvèrent l’homme de qui étaient sortis les démons assis aux pieds de Jésus, vêtu et avec toute sa raison ; et ils eurent peur. 36Ceux qui avaient vu ce qui s’était passé leur racontèrent comment le démoniaque avait été sauvé. 37En foule, tous ceux de la région des Géraséniens demandèrent à Jésus de s’éloigner d’eux, car ils étaient en proie à une grande crainte.
Luc 23,39-43 — Les deux malfaiteurs
39L’un des malfaiteurs suspendus en croix l’injuriait en disant : N’es-tu pas le Christ ? Sauve-toi toi-même et sauve-nous ! 40Mais l’autre le rabroua en disant : N’as-tu donc aucune crainte de Dieu, toi qui subis la même peine ? 41Pour nous, c’est justice, car nous recevons ce qu’ont mérité nos actes ; mais celui-ci n’a rien fait de mal. 42Et il disait : Jésus, souviens-toi de moi quand tu entreras dans ton royaume. 43Il lui répondit : Amen, je te le dis, aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis.
Dans les évangiles, la crainte est une caractéristique de ceux qui voient les œuvres de Dieu mais qui ne sont pas croyants. La conversion peut éventuellement passer par une phase de crainte, pas nécessairement de Dieu lui même mais une crainte de passer à côté de la vérité.
Ici le « bon larron » comme on l’appelle souvent (et de manière abusive) parle de craindre Dieu dans le sens ou il accepte les conséquence de son propre péché en contraste avec Jésus qui subit le même sort mais qui pourtant ne subit pas les conséquences de ses péchés mais de celui des autres.
Actes 10,34-36 — Un message de Pierre sur l'inclusion des non-juifs
34Alors Pierre prit la parole : En vérité, dit-il, je comprends que Dieu n’est pas partial, 35mais qu’en toute nation celui qui le craint et pratique la justice est agréé de lui. 36Il a envoyé la Parole aux Israélites, en leur annonçant la bonne nouvelle de la paix par Jésus-Christ : c’est lui qui est le Seigneur de tous.
Il est intéressant de noter que Pierre parle de craindre Dieu et de pratiquer la justice. il ne parle pas de suivre la loi ou de pratiquer la loi, mais la justice (ce qui pourrait nécessiter un article en soi, car la notion de justice évolue entre l'Ancien et le nouveau Testament). Il s'adresse à des non chrétiens pour qui craindre Dieu est une manière de l'honorer. Mais là aussi il y a mention de la crainte dans le sens d’être comme les vrais juifs de l’ancienne alliance, en référence aux écritures de l'Ancien Testament. Mais lorsqu’on passe de l’ancienne à la nouvelle alliance, ce n’est plus la crainte mais la paix. Cf. par exemple Actes 13,16.26.
Actes 19,17 — Épisode des fils de Scéva
17Cela fut connu de tous ceux qui habitaient Ephèse, Juifs et Grecs ; la crainte s’empara d’eux tous, et le nom du Seigneur Jésus était magnifié.
Ceux qui sont dans la crainte sont ceux qui comprennent que jusque là ils n'avaient pas compris. Ils magnifient le nom du Seigneur Jésus, mais les versets suivants montrent que cela ne suffit pas il faut encore devenir croyant et renoncer aux pratiques occultes (qui sont marginales aujourd'hui, mais il y a beaucoup d'autres occasions de se repentir).
2Corinthiens 5,10-14 — De la crainte à l'amour qui nous presse
10Car il nous faudra tous comparaître en pleine lumière devant le tribunal du Christ, pour que chacun recueille selon ce qu’il aura pratiqué avec son corps : soit du bien, soit du mal.
11Connaissant donc la crainte du Seigneur, nous cherchons à persuader les humains ; nous sommes en pleine lumière devant Dieu, et j’espère être aussi en pleine lumière dans votre conscience. 12Nous n’allons pas nous remettre à nous recommander nous-mêmes à vous ; mais nous vous donnons une occasion d’être fiers de nous, pour que vous ayez de quoi répondre à ceux qui mettent leur fierté non pas dans le cœur, mais dans les apparences. 13En effet, si nous avons perdu la raison, c’est pour Dieu ; si nous sommes raisonnables, c’est pour vous. 14Car l’amour du Christ nous presse...
Paul connait la crainte du Seigneur, parce qu'il l'a expérimentée en tant que juif et il sait que seul le Seigneur sauve. Mais il est passé de la crainte à l’amour qui presse. La crainte est pour ceux qui ne sont pas encore persuadés ni convaincus, l'amour (ressenti) est pour ceux qui l'ont accepté. C'est cela que signifie recueillir selon ce qu'on aura pratiqué (l'expression « dans son corps » est un élément contextuel lié aux débordements sexuels dans l'église de Corinthe).
Apocalypse 11,11-12— les deux témoins du Christ
11Après les trois jours et demi, un esprit de vie venant de Dieu entra en eux, et ils se tinrent sur leurs pieds ; une grande crainte s’empara de ceux qui les voyaient. 12Ils entendirent du ciel une voix forte qui leur disait : Montez ici ! Ils montèrent au ciel dans la nuée, et leurs ennemis les virent.
C’est encore une citation de l’Ancien Testament : il s'agit d'un rappel de la vision d’Ezechiel 37 (en particulier le v10) le célèbre passage des ossements desséchés qui reprennent vie. Ici la crainte est pour ceux qui voient les deux témoins du Christ ressusciter et qui sont leurs ennemis.
Conclusion
L'objet d'une telle liste est de montrer que le nombre d'écritures de ce type dépasse de très loin le nombre d'écritures concernant la crainte de Dieu que devraient avoir les disciples, comme si avec le Nouveau Testament, la crainte de Dieu s'estompait pour eux parce qu'ayant connu le Christ et sa Croix, ils comprennent mieux qui est Dieu et peuvent « ne pas avoir peur » et « être en paix », deux commandements plus fréquents et plus explicites que la crainte de Dieu.