L’épître aux Romains (1,18) parle de la colère de Dieu qui se révèle depuis le ciel contre toute l'impiété et l'injustice des gens qui tiennent la vérité captive dans l'injustice...
Au verset précédent (17) ce qui se révèle c'est la justice de Dieu, en vertu de la foi. Il y a donc un lien fort entre justice et colère. Or cette justice ne s'obtient pas en étant bon ou gentil, mais elle s'obtient par la foi. On peut en conclure que la colère de Dieu est liée à l'incrédulité (manque de foi).
Ce qu'on peut connaître de Dieu par soi-même en réfléchissant sur la nature, la science, le monde, l'histoire, les hommes... n'est pas encore la foi mais peut être un premier pas vers elle : contempler ainsi la création devrait nous pousser à vouloir en savoir plus sur Dieu. Celui qui, contemplant la création, ne comprend pas que Dieu existe, est passible de la colère de Dieu, parce-que que refusant Dieu, il est obligé de raisonner autrement pour justifier de ce qui existe (cf v28). Paul au v24 dit que Dieu les a « livrés » à l'impureté par les désirs de leur cœur. Cette phrase veut simplement dire que Dieu les a laissé être libre et faire ce qu'ils veulent ; ils les a laissé se perdre. Il les a laissé s'auto-mutiler spirituellement, ce qui a parfois des conséquences physiques. On trouve la même idée aux v26 à 28.
De la même manière, lorsque l'évangéliste Jean (celui qui écrit le texte) fait un commentaire de transition entre l’œuvre missionnaire de Jésus et son dernier repas avec ses disciples (Jean 12) : il dit ceci : « 37 Malgré tous les signes qu'il avait produits devant eux, ils ne mettaient pas leur foi en lui, 38 de sorte que soit accomplie la parole du prophète Esaïe, qui a dit : Seigneur, qui a cru ce qu'il nous a entendus dire ? Et à qui le bras du Seigneur a-t-il été révélé ? 39 S'ils ne pouvaient pas croire, c'est qu'Esaïe a encore dit : 40 Il a rendu leurs yeux aveugles et leur cœur obtus, pour qu'ils ne voient pas avec leurs yeux, qu'ils ne comprennent pas avec leur cœur et qu'ils ne fassent pas demi-tour : je les aurais guéris ! 41 C'est ce qu'a dit Esaïe, parce qu'il a vu sa gloire et qu'il a parlé de lui ».
Peut on raisonnablement penser que Dieu aveugle les gens quand par ailleurs il veut que tous les hommes soient sauvés ? Soit on identifie là un mystère divin impénétrable issu de la souveraineté d'un Dieu incompréhensible qui nourrit de la colère à cause de l'aveuglement de ceux qu'il a lui-même aveuglé, soit on creuse un peu.
La première citation de l'évangéliste est issue d'Esaïe 53 qui parle du serviteur souffrant rejeté, que personne n'a cru. On ne peut comprendre la deuxième citation (Esaïe 6) sans prendre en compte la première : les gens attendaient un messie guerrier ou politique (souvent les deux allaient ensemble) qui les délivrerait de l'oppression romaine et qui rétablirait un royaume pour Juda et Israël. Dieu leur a envoyé un messie souffrant dont le dessein s'accomplit dans la faiblesse. Et cela les a aveuglé : il sont passé à côté du messie de Dieu parce que Dieu ne pensait pas comme eux.
Nous aussi, nous courrons le risque d'être charnels et de penser que Dieu est à notre image alors que c'est le contraire qui est vrai.
Ainsi, que ce soit dans l'épître aux Romains ou dans l'évangile de Jean, Dieu nous « livre » à notre liberté. Soit nous le suivons, et nous savons où nous allons. Soit nous sommes livrés à nous-même avec la lourde responsabilité de devoir chercher un sens à notre vie et de vivre en accord avec celui-ci.
En Romains 1,32 le juste décret de Dieu du v32, est celui de la colère. Non pas d'une colère arbitraire, mais d'une colère qui se dirige contre ceux qui, sans foi, n'adorent qu'eux mêmes au détriment de l'autre. Qui se sert des autres au lieu de les servir.
Autant la transition entre le v17 et le v18 était abrupte autant l'est celle entre les chapitres 1 et 2. Nous sommes appelés à laisser la colère à Dieu. Nous n'avons pas le droit de juger les pécheurs, car en jugeant nous devenons pécheurs nous-même. Tout le chapitre 2 est une diatribe contre l'hypocrisie religieuse qui consiste à mettre sa confiance dans la religion plutôt qu'en Dieu. Les chapitres suivants nous donnent les éléments nécessaires à cette relation que Dieu désire tant avec nous : foi1, repentance2, baptême3.
La grâce n’éteint pas la colère. Celle-ci existe toujours, et est destinée à ceux qui refusent la grâce dont le but n'est pas de couvrir nos péchés, mais de nous transformer, comme on transforme un bloc de pierre en sculpture. Elle a pour but de nous sortir de notre condition d'homme charnel et nous faire devenir spirituels. Car Dieu a la foi : il croit fermement que son amour peut nous transformer. Il n'attend pas que nous soyons transformés pour nous donner son amour. Nous n'avons pas à craindre la colère avant le jour du jugement. Il n’y a donc, maintenant, plus aucune condamnation pour ceux qui sont en Jésus Christ (Romains 8,1 et suivants).
En conclusion de ces neufs articles qui nous ont fait méditer sur la colère mais aussi sur la jalousie, le pardon et le jugement de Dieu, nous pouvons donc dire de manière simple que Dieu a fait sa part, il a donné son fils, il a payé la rançon, il a ouvert une porte dans notre prison : à nous d'en sortir. Finalement tout est accompli (Jean 19,30) : il n'y a plus qu'à choisir entre la colère ou la grâce. Nous avons qu'une vie pour le faire.
Questions pour méditer :
- Est-ce que je comprends que ce que Dieu révèle dans la nature n'est pas la même chose que ce qu'il révèle dans l’Évangile ?
- Est-ce que je comprends que contempler la nature me dit des choses sur Dieu qui ne me suffisent pas pour le connaître ?
- Est-ce que je comprends que Dieu n'aveugle personne mais que c'est moi qui m'aveugle tout seul ? (cf Jean 9) ; Qu'est-ce qui peut me redonner la vue spirituelle ?
- Comment accepter la grâce de Dieu ?
- Quelle conséquence devrait avoir mon acceptation de la grâce ?
- A quoi suis-je livré ? à qui est-ce que je veux obéir ? à qui est-ce que je veux appartenir ? qu'est-ce que je veux devenir ?
- Si je reprend la liste des raisons qui suscite la colère de Dieu auxquelles j'ai pensé à l'article 1 (introduction), est-ce que cette liste reste pertinente ?
Notes
1Romains 3,21 à 5,21
2Romains 6,1-2.12-23