La pierre de l'angle

Le « symbole des apôtres » dont vous pouvez lire le texte à droite de cette page, est une des plus anciennes formules complètes pour exprimer la foi élaborée par l’Église ancienne1. Cependant il n'a d'apostolique que le nom, et fut probablement élaboré par l'église de Rome au deuxième siècle pour être récité au moment du baptême.

Après avoir brièvement parlé du Père, le texte introduit un long article sur la personne de Jésus qui commence par une formule très proche d'Actes 8,372. Ce paragraphe qui résume le parcours du Christ est suivi d'une brève reconnaissance de la confiance que le croyant a en l'Esprit-Saint. Ainsi du point de vue de la structure littéraire, le deuxième article du vieux credo est au centre, entre le Père et l'Esprit-Saint, mais il est aussi le plus complet et le plus étoffé. Jésus est la pierre de l'angle3 pour la foi.

Ce que la structure de ce texte indique c'est que pour comprendre le Père et pour saisir l'Esprit, nous ne pouvons que nous appuyer sur le Fils. Sans le Fils pas d'accès au Père4 et pas de réception de l'Esprit5. Cette insistance sur Jésus-Christ signifie aussi qu'on aurait tord de vouloir chercher Dieu en dehors de lui.

Lorsque les théologiens s’acharnent à parler de Dieu sans parler de Jésus-Christ, ils font fausse route. Commencer par, ou trop insister sur le Dieu créateur, conduit à l'impasse théologique en cultivant une compréhension philosophique de Dieu. De la même manière envisager le christianisme en propulsant l'Esprit-Saint sur le devant de la scène, conduit à l'impasse théologique en cultivant un désir d'expérience spirituelle. Dans les deux cas on aboutit paradoxalement à l'incrédulité : dans le premier cas parce qu'on veut comprendre l'incompréhensible avant de croire, dans le deuxième cas parce qu'on veut voir l'invisible avant de croire.

Pourtant il ne s'agit pas de croire ni stupidement ni aveuglément, car la raison et l'expérimentation sont nécessaires6 à la vie chrétienne, mais dans les deux cas, elles servent de gardes-fou (Jean 7,17) et non de justification de la révélation de la Parole de Dieu (le logos) qui est Jésus-Christ (Jean 1,14).


Notes

On parle d' « Église ante-nicéenne » c'est à dire de l’Église avant le grand concile de Nicée organisé par l’empereur Constantin en 325 pour régler une longue dispute théologique qu'on appelle la crise Arienne (sur la divinité de Jésus).

2  Cette formule est un ajout tardif. Certaines traduction laissent le verset vide.

Matthieu 21,42 ; Marc 12,10 ; Luc 20,17 ; Actes 4,11 ; Éphésiens 2,20 ; 1Pierre 2,7

Jean 14,6

Jean 16,7

Nécessaire est à comprendre ici comme « incontournable » ou « obligatoire ».

 Je crois

 en Dieu

le Père tout-puissant,
créateur du ciel et de la terre

 et en Jésus Christ,

son Fils unique,
notre Seigneur,
qui a été conçu de l’Esprit Saint,
est né de la vierge Marie,
a souffert sous Ponce-Pilate
a été crucifié,
est mort,
a été enseveli,
est descendu aux enfers,
le troisième jour
       est ressuscité des morts,

est monté aux cieux,
est assis la droite de Dieu
       le Père tout-puissant

d’où il viendra juger
       les vivants et les morts ;

 et en l’Esprit Saint,

 Je crois

[à] la sainte Église universelle,
[à] la communion des saints,
[à] la rémission des péchés,
[à] la résurrection de la chair,
[à] la vie éternelle.