Y-a-til aussi des versets sataniques dans la Bible ?
Question :
Dans la Bible on trouve un certains nombre de versets qui font peur ! Par exemple : Genèse 19,8 ; Exode 21,20-21 ; Lévitique 25,44-45 ; 1Pierre 2,18 ; Deutéronome 22,20-21 ; Deutéronome 22,20-21 ; Deutéronome 23,1 ; Deutéronome 25,11-12; Lévitique 20,9 ; Lévitique 21,18-19 ; 2 Rois 2,23-24 ; Psaume 137,9.
Comment comprendre ces versets et surtout comment répondre aux non-croyants qui utilisent ces versets pour nier la foi ? Doit-on accepter ces versets comme tels au prétexte que la Bible est inspirée de Dieu ? Doit-on au contraire reconnaître qu'il y a des erreurs dans la Bible ? Ou peut-on comme le suggère un article, démontrer que ces versets sont écrits comme condamnation et non comme justification de ce dont ils parlent ?
Bruno
Genèse 19,8
J'ai deux filles qui n'ont jamais eu de relations avec un homme ; je vais les faire sortir vers vous, et vous leur ferez ce qu'il vous plaira. Seulement, ne faites rien à ces hommes, puisqu'ils sont venus à l'ombre de mon toit.
Exode 21,20-21
Lorsqu'un homme frappe son esclave ou sa servante avec un bâton, si l'esclave ou la servante meurt sous sa main, celui-ci sera vengé. Mais s'il survit un jour ou deux, il ne sera pas vengé, car c'est son argent.
Lévitique 25,44-46
Ton esclave et ta servante, ceux qui t'appartiennent, c'est aux nations qui vous entourent que vous pourrez les acheter, l'esclave et la servante. Vous pourrez aussi les acheter aux fils des résidents temporaires qui séjournent en immigrés chez vous, et à leurs clans qui sont chez vous, les clans qu'ils ont engendrés dans votre pays ; ceux-là seront votre propriété. Vous les laisserez comme patrimoine à vos fils après vous, comme une propriété dont ils hériteront ; vous les garderez comme esclaves à perpétuité. Mais pour ce qui est de vos frères, les Israélites, aucun de vous ne dominera avec rudesse sur son frère.
1Pierre 2,18
Domestiques, soyez, en toute crainte, soumis à vos maîtres ; non pas seulement à ceux qui sont bons et conciliants, mais aussi à ceux qui sont difficiles ;
Deutéronome 22,20-21
Mais si la chose est vraie, si les signes de la virginité n'ont pas été trouvés chez la jeune femme, on fera sortir la jeune femme à l'entrée de la maison de son père ; les gens de sa ville la lapideront ; elle mourra, parce qu'elle a commis une folie en Israël, en se prostituant dans la maison de son père. Tu élimineras ainsi de ton sein ce qui est mauvais.
Deutéronome 23,2
Celui dont les testicules ont été écrasés ou le pénis coupé n'entrera pas dans l'assemblée du SEIGNEUR.
Deutéronome 25,11-12
Lorsque des hommes se querellent l'un avec l'autre, si la femme de l'un s'approche pour délivrer son mari de la main de celui qui le frappe, si elle avance la main et saisit ce dernier par les parties honteuses, tu lui couperas la main ; ton œil sera sans pitié.
Lévitique 20,9
Quiconque maudira son père ou sa mère sera mis à mort : il a maudit son père ou sa mère, son sang sera sur lui.
Lévitique 21,18-19
Aucun homme qui a une malformation ne pourra se présenter : qu'il soit aveugle, boiteux, qu'il ait le nez déformé ou un membre trop long ; qu'il ait une fracture au pied ou à la main ;
2Rois 2,23-24
De là il monta à Beth-El ; comme il montait par le chemin, des gamins sortirent de la ville pour se moquer de lui, en disant : Monte, chauve ! Monte, chauve ! Il se retourna, les vit et les maudit au nom du SEIGNEUR. Alors deux ourses sortirent de la forêt et mirent en pièces quarante-deux de ces enfants.
Psaume 137,8-9
Babylone la belle, toi qui vas être ravagée, heureux qui te paiera de retour pour le mal que tu nous as fait ! Heureux qui saisira tes enfants et les écrasera contre le roc !
Éléments de réponse :
1ère partie : sur le principe
La question posée est en fait celle de l'inspiration de la Bible. En 2Timothée 3,16 il est écrit que « toute écriture est inspirée de Dieu ». Que faut-il comprendre d'une telle phrase ? C'est là la clé de la réponse à cette question.
Il semble évident qu'un non croyant ne peut se satisfaire d'une explication du style « Dieu est Dieu, il fait ce qu'il veut » (option 1 de la conclusion de l'article). Les croyants non plus ne devraient pas s'en satisfaire, car ce serait accepter que Dieu a lui aussi un côté sombre. Ce serait incompatible avec le Nouveau Testament qui nous explique que Dieu est amour (1Jean 4,8.16). Ce serait une flagrante contradiction.
La question « Si Dieu est amour comment peut-il inspirer de tels versets ? » doit nous interroger sur notre manière de voir l'inspiration.
Dans les milieux fondamentalistes, on a souvent tendance à confondre les choux et les carottes, je veux dire qu'on confond inspiration et inérrance1. Dire que la Bible est inspirée n'a rien à voir avec l'idée que la Bible est sans erreur. Bien sûr on pourrait penser que si Dieu est Dieu il ne peut se tromper. Et on aurait raison. Mais ce serait oublier que la Bible n'a pas été écrite par Dieu. La Bible n'est pas un livre dicté du ciel (à l'ange Gabriel par exemple). C'est en fait un recueil de documents écrits par des hommes. Si l'Esprit de Dieu est présent dans la Bible, ce serait lui faire injure de dire qu'on le trouve dans la lettre du texte. Paul disait que « la lettre tue, mais l'Esprit fait vivre » (2Corinthiens 3,6). L'un n'est pas l'autre. Ils se distinguent nettement. Le fondamentalisme biblique qui stipule que ce qui est écrit l'a été par l'Esprit-Saint de Dieu n'est pas intellectuellement viable.
Mais alors comment considérer cette inspiration ? Et bien il s'agit de comprendre le processus de révélation de Dieu : il se révèle partiellement dans la création (Romains 1,19-20), il se révèle progressivement dans l'Ancien Testament (1Pierre 1,10-12) mais ce n'est qu'en Jésus-Christ qu'il se révèle pleinement (Jean 1,1-3.14.18 ; Colossiens 2,9) et le Nouveau Testament est en fait le témoignage (autorisé) sur cette révélation.
Que les faits historiques bibliques soient plus ou moins teintés de merveilleux, que les indications géographiques soient approximatives, que les citations viennent du texte hébreu ou du texte grec n'a aucune importance au regard de la vérité spirituelle c'est-à-dire au regard de la vérité que l'Esprit veut nous transmettre. Quand on regarde les écritures de cette manière, on comprend alors que l'Ancien Testament est l'ombre des choses à venir (Hébreux 10,1). Il correspond à une recherche de Dieu, pas toujours adroite, pas toujours claire. Tout n'est clarifié qu'en Jésus-Christ (1Pierre 1,10-12).
L'Esprit a guidé les auteurs de la Bible hébraïque, pour qu'à l'avènement du Christ, le peuple juif soit capables de le reconnaître (comme Syméon en Luc 2,25-32).
Ainsi, tout comme l'exactitude historique ou géographique n'ont pas d'importance, l'exactitude théologique n'est pas non plus une évidence. Surtout en ce qui concerne l'Ancien Testament. Car tout est mis à plat lorsque le Christ apparaît, lui qui se permit de répéter : « vous avez entendu qu'il a été dit... mais moi je vous dis... » (Matthieu 5,21-48).
Le fondamentalisme, et plus encore l'intégrisme, se fourvoient lorsqu'ils pensent trouver dans la Bible les Paroles dictées par Dieu. Dieu a une bien plus haute opinion de l'intelligence qu'il a donnée à l'humain. Il a donné à l'humain tout ce dont il a besoin pour le chercher et le trouver (car il se cache – Ésaïe 45,15). Cela se fait en tâtonnant (Actes 17,27), pas seulement en obéissant à des règles dictées du ciel. Vouloir faire de la Bible une règle de loi c'est une attitude périmée :
Romains 7,6 maintenant, morts à ce qui nous tenait captifs, nous avons été affranchis de la loi, de sorte que nous servons sous le régime nouveau de l’Esprit et non plus sous le régime périmé de la lettre (TOB).
2ème partie : dans le détail
Il n'y a pas la place ici pour faire l'exégèse et interpréter chaque passage cité ci-dessus. Mis ensembles ils donnent un aperçu détestable de l’Écriture. Et on pourrait en trouver d'autres.
Mais il est un premier point intéressant : les différents auteurs, compilateurs, rédacteurs et copistes qui ont travaillé le texte au cours des siècles n'ont pas supprimé ces versets. Ils les ont conservés, parce qu'ils avaient un respect pour le texte.
Un deuxième point important c'est de comprendre que si l'Esprit de Dieu traverse celui des auteurs, ceux-ci n'en sont pas moins inscrits dans une culture qu'il faut comprendre pour saisir le texte.
Prenons comme exemple le texte de 1Pierre 2,18. Au premier siècle l'esclavage faisait partie de l'organisation de la société. Les auteurs bibliques auraient-ils dû s'en préoccuper et se rebeller contre cet ordre social injuste ? Ce serait tomber dans le piège d'un double anachronisme :
- D'abord en projetant sur l’Église primitive des problématiques modernes. Car les premiers chrétiens n'avaient aucune intention de réformer la société en critiquant son comportement (Romains 13,1-7 ; Tite 3,1). S'ils avaient eu l'intention de la changer cela aurait plutôt été par la conversion des gens.
- Ensuite en projetant sur l’Église ancienne l'image de l’Église d'aujourd'hui qui justement s'est donnée pour rôle d'agir sur la société, parce que pendant des siècles elle fut garante de la chrétienté. Les premiers chrétiens ne cherchaient pas à être une voix dans la société (ils n'étaient pas assez nombreux pour même y penser) mais ils voulaient créer une sorte de société parallèle dans laquelle justement prévaudrait l'égalité (1Corinthiens 12,13 ;Galates 3,28 ; Colossiens 3,11).
Et puis isoler ce passage du reste du texte ne lui rend pas justice. Car il ne s'agit aucunement de justifier l'esclavage, mais d'encourager ceux qui souffrent de cette situation, non pas à se rebeller, mais à s'en remettre à Jésus-Christ qui a lui aussi subit l'injustice. Ainsi l'esclavage est vu de manière négative si on remet le verset dans son contexte. Même Paul et ses disciples voyaient le trafic d'esclaves comme un péché (1Timothée 1,10).
1 L'inérrance de la Bible est une doctrine qui stipule que tout ce qui est écrit dans la Bible est vrai quel que soit le point de vue duquel on se place : elle serait ainsi vraie du point de vue historique, géographique, législatif, théologique et même scientifique.