La côte d'Adam est elle à l'origine de la femme ?

Merci encore pour ce message génial (https://youtu.be/HLJWefxLswc).

Il y un point qui m'interpelle quand-même. L'histoire de la côte qui manque. J'avais déjà entendu que la côte était un os qui pourrait repousser. En faisant des recherches j'ai trouvé quelques liens. Certains on l'air sérieux, comme doctissimo par exemple. Mais pas beaucoup de liens en français, et en anglais, il y a un peu de tout :
En français : https://fr.answers.yahoo.com/question/index?qid=20120809140624AA3ZMhI,
En anglais : faire une recherche avec : "ribs grow back" (attention : risque de tomber sur des sites avec des pubs pas très saines) ;

Même s'il n'y a pas beaucoup d'articles à ce sujet, je n'ai pas trouvé de contre-article non plus, ce que certains feraient avec empressement s'ils avaient des preuves. Et même dans le texte biblique, vu que Dieu prend le soin de préciser qu'il avait refermé la chair à sa place, me fait plutôt croire que la chose s'est vraiment passé. Sans parler de la réaction émotive de l'homme (os de mes os, chair de ma chair...). Si toute l'histoire est de la création est considérée comme symbolique, ma question n'a pas de sens bien sûr, mais j'ai l'impression que tu as présenté juste cette histoire de côte comme symbolique.

Nurhan


Salut Nurhan,

Tu as compris que je ne prends pas le texte biblique au pied de la lettre.

Ce que je cherche n’est pas de savoir si le texte dit vrai en matière de science pour dans un second temps le croire en matière de théologie. Je pense même que chercher à prouver que le texte dit vrai scientifiquement (ou même historiquement) pour en faire une preuve qu’il dit vrai sur Dieu est plutôt un signe d’incrédulité. Car c’est une démarche issue du modernisme : il faut prouver toute chose par des liens de cause à effet. Il faudrait ainsi prouver que le texte dit vrai humainement pour croire dans le Dieu du texte. C’est le même genre de démarche que Thomas en Jean 20 (la science est une façon de regarder la réalité, pertinente pour observer le monde qui nous entoure, mais pas pour comprendre Dieu ; Thomas fait une expérience scientifique : il teste la réalité des stigmates du Christ).

Je préfère la démarche inverse : je fais confiance à Dieu (ce qui est différent de croire au sens moderne), et je cherche dans le texte ce qui me permet de mieux comprendre qui il est. Mais cela n’est possible qu’avec Jésus qui est la Parole incarnée, la vérité incarnée (et non le texte - il n’y a que trois personnes dans la trinité !). Donc j’ai une lecture christocentrique de la Bible. A partir de là, le côté scientifique n’est plus un obstacle. Et je ne perds plus mon temps à essayer de prouver scientifiquement la Bible. Je n’en n’ai plus besoin, et si l’on cherche à attaquer ma foi de par ce côté là, je ne risque rien.

L’histoire de la côte est pour moi ce que les hébreux appelaient maschal, et que les grecs appelaient parabolè. Vouloir en faire un texte historique (au sens ou on voudrait croire que Adam et Eve on réellement existé) et/ou scientifique (tout ce qui est dit s’est passé comme ça) c’est entrer dans une spirale infernale de justification de milliers de passages bibliques qui
1/ s’accordent mal avec les connaissances d’aujourd’hui,
2/ s’accordent mal (c’est à dire au prix de circonvolutions intellectuelles terribles) entre eux,
3/ conduisent à une image de Dieu assez négative (violente, versatile, punitive, arbitraire).

Pour rester sur notre exemple, comment concilier que l’humain fut créé mâle et femelle et qu’ensuite il a fallu prendre une côte pour créer le côté féminin ? Il y a plusieurs possibilités mais qui toutes sont ce qu’on appelle des conjectures : on fait une supposition sur laquelle on bâtit un raisonnement, sans être sûr que l’hypothèse soit bonne. Par exemple on peut conjecturer que l’humain « mâle et femelle » est androgyne et devient « masculin + féminin » par la suite, lors du deuxième récit. Mais le côté androgyne n’est pas clairement affirmé par le texte, c'est une conjecture. Ou alors on peut expliquer que « mâle et femelle » sont la même chose que « homme et femme » et que finalement le deuxième récit de la création est juste plus précis dans la description du processus. Mais alors comment se fait-il que l’humain soit seul au départ ? Il n’est pas conforme à la définition de l’humain dans le premier texte. Un aspect intéressant du mot traduit par « côte » (צֵלָע - tsela) est qu'on devrait plutôt le traduire par « côté » car c'est le premier sens du mot hébreu. Corrélée à la signification du genre (homme/femme), ce n’est plus le féminin qui vient du masculin, mais les genres qui surgissent de l’Adam certes déjà mâle et femelle mais dont les genres/rôles ne sont pas déterminés avant Genèse 2. Au final, on peut dire qu'à chaque conjecture on peut opposer son lot d’interrogations ou d'objections qui poussent à d’autres conjectures qui nous éloignent alors du texte et surtout de sa signification : quand le sage montre la lune, le fou regarde le doigt. On pourrait reformuler ce proverbe :

Quand le texte montre Dieu, le fondamentaliste regarde le texte.

Pour moi le littéralisme biblique se trompe de méthode et est contre productif en éloignant les gens de l’essentiel.

Pour aller plus loin :
Une très belle conférence de la faculté de théologie de Montpellier :
conférence sur le fondamentalisme 

Un très bon bouquin (en anglais) :
The Bible Made Impossible
 

Un très bon article de synthèse, simple et accessible :
Thomas RÖMER, « qui sont Adam et Eve, quelques lignes qui changèrent le monde », Le monde des Religions, N° 86, Nov/dec 2017, p.26-29

Dans mon message, je fais une sorte de démonstration de la manière dont Jésus résonnait. Il est vrai que j’aurais pu m’abstenir de faire le commentaire sur la côte, et le raisonnement aurait été le même. De même quand je parle du « commencement » qui n’est pas à prendre forcément de manière chronologique. Mais je crois que les chrétiens doivent pouvoir entendre différents points de vue herméneutiques et aussi reconnaître qu’on peut vivre ensemble unis même si on a des visions différentes sur la nature du texte biblique.

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